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27 octobre 2008

Cinéma: W.

Que l'on aime ou que l'on n'aime pas Oliver Stone, force est de constater que l'homme a du cran. Le cinéma et la contestation, il connaît et n'hésite pas à utiliser son art pour créer la polémique contre toute velléité de pensée unique.

Dès 1986, "Salvador", l'un de ses premiers et plus beaux films, dénonce de façon poignante l'interventionnisme américain en Amérique du Sud. Cinéaste engagé et rebelle, il va encore plus loin avec sa trilogie vietnamienne "Platoon", "Né un 4 juillet" et "Entre ciel et terre"- où il dresse une critique viscérale de la guerre.

Au même moment, il s'en prend aux Yuppies et aux requins de la finance internationale made in US dans "Wall Street", avant d'oser l'impossible: il s'attaque à l'icône numéro un de la politique américaine: "JFK" (1991). Il y remet en question les conclusions officielles du rapport Warren sur l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Pire, il pointe du doigt la CIA. Le film fait scandale, mais rafle huit nominations aux Oscars et deux statuettes.

Nul doute, Oliver Stone aime réaliser des "biopics" et ses biographies filmées s'attachent surtout aux destinées de grands hommes: "Nixon" (1995), Fidel Castro dans le documentaire "Commandante" (2002) ou encore "Alexandre" le Grand en 2005. Avec son dernier film, "W.", il brise un autre tabou de l'histoire du septième art américain: raconter la vie d'un président au pouvoir, avant son départ officiel de la Maison Blanche.

"W. L'improbable président" (mercredi dans les salles) devient ainsi la première fiction dans l'histoire du cinéma américain, réalisée sur un président encore en fonction lors de la sortie du film.

Dans cette biographie de deux heures, le réalisateur relate l'incroyable parcours du 43ème président des Etats-Unis, pour révéler aux public "comment George W. Bush est passé du statut d'alcoolique notoire à celui de président" de la première puissance du monde.

Pour raconter l'histoire de W., Oliver Stone s'est intéressé à trois moments-clés de la vie de George W. Bush: sa jeunesse dorée passée dans l'alcool et la rébellion contre George Bush père, sa rédemption en "born again christian", en chrétien repenti et bon père de famille et son élection au poste suprême jusqu'à l'invasion de l'Irak.

Certes, l'actuel président américain est une cible facile: son taux de popularité frôle celle de Nixon au moment de l'impeachment et il s'est mis à dos la quasi-totalité de la planète, y compris ses propres concitoyens. Et pourtant Oliver Stone se défend d'avoir voulu enfoncer son personnage principal avec lequel il a partagé ses années étudiantes à la faculté de Yale.

"Ce film n'est pas là pour accuser ou glorifier Bush", assure-t-il. "Mon objectif n'est pas de rabaisser ou de blesser cet homme. (...) Je voulais montrer que sa vision de la guerre en Irak reflétait ce qu'il est et son histoire personnelle. J'espère qu'en sortant des salles, les gens se diront: 'je comprends ce type. Je ne suis peut-être pas d'accord avec lui, mais je comprends'".

Posture médiatique ou véritable désir de cinéaste? Toujours est-il que "W." n'est ni une satire à la Michael Moore, ni une biographie intimiste en empathie totale avec son héros. C'est l'histoire d'un fils de bonne famille, pas très cultivé et plutôt bon à rien, qui n'aimait ni la vente d'articles de sport, ni les banques d'affaires ni les puits de pétrole, ni la garde nationale, bref l'histoire d'un homme très imparfait qui serait devenu président par accident.

Pour réaliser ce film, Oliver Stone et son scénariste, Stanley Weiser, ont visionné des centaines d'heures de discours et d'archives de la présidence Bush. Des moments marquants de sa présidence aux épisodes les plus cocasses de sa vie comme celle du Bretzel avalé de travers, rien n'a été oublié.

Dans la peau de George W. Bush, l'un des acteurs les plus talentueux du moment, alias Josh Brolin ("No country for old men") offre une performance magistrale. A ses côtés, James Cromwell et Ellen Burstyn incarnent à merveille George et Barbara Bush, les parents du président, tandis que Toby Jones (Karl Rove), Scott Glenn (Donald Rumsfeld) et Richard Dreyfuss (Dick Cheney) constituent sa garde rapprochée.

Tourné en 46 jours à Shreveport (Louisiane), avec un petit budget de 25 millions de dollars, le film n'a pas reçu le soutien des grands studios d'Hollywood. Et s'il n'a pas été interdit par le pouvoir américain, "W." a connu d'importantes difficultés de tournage, sans compter une déprogrammation de dernière minute au Festival de Rome.

Alors que l'on aime ou que l'on n'aime pas le dernier film d'Oliver Stone, force est de constater que l'homme a du cran. Véritable camouflet pour la Maison Blanche, son "W." constitue un défi, un acte de courage artistique et politique. Du jamais vu.

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